A sa naissance, le bébé est considéré comme étant âgé de un an puisque selon la pensée bouddhiste, la vie est à relier avec la réincarnation d’un esprit, et commence dès la conception dans le mental des parents, puis se poursuivra durant les neuf mois de grossesse.

1/ Naissance et enfance

Les croyances et les rituels qui existent autour de la grossesse et la naissance mettent encore une fois en lumière la forte dimension mystique que l’on peut retrouver au Vietnam. Pour présenter rapidement ces pratiques nous nous appuieront sur le texte très descriptif que Luong Can Liêm et ses collègues (2003) ont consacré à ce sujet.

Conformément aux croyances traditionnelles d’origine chinoises, il faut tout d’abord considérer le nouveau-né comme un « sujet harmonieux du rapport complémentaire », issu d’une rencontre entre l’énergie male et femelle, s’inscrivant dans un mécanisme cyclique entre le temps de la naissance, de la mort, puis à travers la réincarnation, d’une nouvelle naissance. Liêm met alors en évidence les différentes représentations qui peuvent exister entre les cultures asiatiques et occidentale, et précise donc bien de ne pas voir au Vietnam le nouveau-né comme « le troisième être, forcément regardé comme sexué par les parents en tant que (supposé) rival, allié ou complice », mais au contraire s’intégrant pleinement dans un ordre plus absolu.

Bertrand (1998), précise alors que cet ordre lié au karma, va orienter le destin de l'enfant. Aussi, si « c'est le père et la mère qui engendrent et donnent la forme mais c'est le Ciel qui donne le caractère ».

Aussi, autour de la grossesse, certaines croyances recommandent que l’enfant soit conçu et né en année pleine, et mettent en garde les grossesses pendant le Têt, « cela voudrait dire que le bébé a été dédoublé avant d’apparaître entier à sa naissance. Il faudra le surveiller pour qu’il ne se « clive » pas ».

A sa naissance, le bébé est considéré comme étant âgé de un an puisque selon la pensée bouddhiste, la vie est à relier avec la réincarnation d’un esprit, et commence dès la conception dans le mental des parents, puis se poursuivra durant les neuf mois de grossesse. Très tôt, à la naissance ou peu de temps après, le bébé reçoit généralement au poignet, un fil, symbole d’attachement possédant plusieurs significations : il représente un « acte de naissance et de reconnaissance symbolique » que les parents accordent à leur nouvel enfant, il symbolise également la perpétuation de filiation de génération en génération, et enfin, il « attache l’esprit et le corps en une seule entité pour démarrer une existence ».

Après la naissance, c'est la mère qui veille à la bonne croissance des enfants. L’allaitement a traditionnellement lieu pendant les six premiers mois, et se prolonge parfois jusqu’à deux ans complété par d’autres apports alimentaires (soupe de riz, viande émincée, légumes…). On dit du nouveau-né qu'il est « sans connaissances, sans sensations » (« Vo tri vo giac »). C'est à la mère « d'éveiller sens et intelligence chez l'enfant. La sentence populaire est à cet égard sans
appel : "enfants mal éduqués, responsabilité à la mère" (Con hu tai me) ». Nous verrons plus loin que ce proverbe peut également s’adresser à la grand-mère…

Aussi, après l’accouchement, quand l’enfant arrive dans la maison familiale pour la première fois, la famille, comme avec un invité adulte, lui fera faire le tour de la propriété : « le parent (le père, la mère ou un grand-parent) le porte d’une pièce à l’autre comme (…). On lui décrit le mobilier et la disposition des objets comme si c’était à une grande personne. On fait marcher les machines, on lui donne à entendre l’eau des robinets ouverts, écouter les fenêtres s’ouvrir. Dans la campagne vietnamienne, on fera le tour du potager ou aller visiter le caveau familial comme pour se présenter à la famille ». Evidemment, au cours de cette première visite, l’enfant sera également présenté aux ancêtres et la famille se recueillera ensemble devant l’autel.

Une autre pratique qui suit de près la naissance est également riche en symbole. Traditionnellement, la mère ou parfois une grand-mère, dessine avec la queue d’une feuille de bétel, la ligne des sourcils : « Il est bon qu’elle le fasse d’un seul trait, à main levée, dans un geste assuré comme porteur de l’entière confiance que l’évènement requiert. La tradition indique que c’est la manière de dessiner la beauté future du visage et de donner les traits visibles de la personnalité de l’enfant ». Puis, poursuivant son entrée dans le monde visible, le bébé va être présenté aux forces invisibles et viendra saluer l’autel des ancêtres ainsi que celui du génie du foyer.

Après la fête de fin de berceau a habituellement lieu, une « épreuve divinatoire » sensée révéler « une pré-inscription du destin de l’enfant ». Lors de cet évènement l’enfant est placé devant un plateau sur lequel la famille a disposé différents objets représentatifs avec des perspectives de choix d’avenir comme un miroir, un stylo, un livre, un outil… On laisse alors l’enfant saisir les objets qu’il aime, et on note sur un mode ludique ses différents choix. Les choix personnels de l’enfant seront alors évalués, et pourront servir de base ensuite pour prévoir des évènements à venir et deviner les perspectives d’avenir de l’enfant.

La relation entre le bébé et le monde invisible va se prolonger tout au long de l’enfance par des moments symboliques précis et des cérémonies qui comporteront des offrandes aux ancêtres et aux divinités : une première cérémonie a lieu trois jours après la naissance, puis une autre s’effectue après le premier mois (« cúng mụ »), puis une troisième au centième jour, et enfin une dernière pour l’anniversaire de la première année appelée aussi la fête de la fin de berceau (« thôi nôi »)…

Aussi, il est usuellement considéré que le développement naturel se réalise sous la protection de douze fées qui sont chacune chargées de former l’enfant en lui apprenant à parler, à rire, à se déplacer... Aussi, quand « le bébé a un mois, on fait un sacrifice aux génies, pour demander leur protection ».

Inversement, les croyances populaires craignent également « les ancêtres décédés qui se vengent sur les enfants de leurs descendants, les rendant malades jusqu'à obtenir les offrandes souhaitées. Les familles ayant eu des enfants morts sont mises à l'écart. Mais les âmes des ancêtres qui continuent à veiller sur leurs descendants ou bien les persécuter ne sont qu'une partie de toutes les âmes qui errent ».

*/  Cette cérémonie est spécialement dédiée à la déesse Lucine qui reçoit douze paires de chaussettes, douze chiques de bétel, des gâteaux…, le chiffre de douze renvoyant aux douze déesses qui ont modelé le petit homme dans le ventre maternel.
*/  La notion de la fête du centième jour correspond à la fin de la durée nécessaire à la métamorphose permettant le passage du nourrisson entre le monde formel (visible) et informel (invisible). Cette durée de cent jours s’applique également lors d’un décès, achevant le départ du monde visible vers l’espace du nirvana, et sera célébré par la « cérémonie du centième jour ».
Dans ce cas, Bertrand (1998) nous rappelle que la pathologie des enfants doit souvent se comprendre au Vietnam comme en lien avec l'arrière-monde : « le corps se fait porteur des griefs des ancêtres qui le torturent ou il est possédé par les esprits, les cas de perte de l'âme sont plus rares. Parler et penser la maladie c'est aussi exprimer son rapport aux ancêtres morts et aux esprits de l'au- delà qui ont des besoins très proches de ceux des humains. Aussi inspirent-ils plus respect que peur, ils vivent aux côtés des hommes et la plupart estiment que si on leurs rend les rites qu'on leur doit, on ne devrait pas plus avoir de problèmes ».

2/ La place du garçon

La place du garçon au Vietnam est largement valorisée par rapport à celle de la fille comme le montre clairement différents dictons populaires comme « avec un seul garçon, on a, avec dix filles, on n’a rien », ou encore « dix filles ne valent pas un testicule de garçon ». Dans les campagnes, la place du garçon est préférée car dans le monde paysan, le travail du garçon est considéré comme plus profitable, ce qui sera alors plus intéressant pour la retraite des parents comme le rappelle le dicton : « Enfant, on compte sur son père, vieux on compte sur ses enfants ». Egalement, le garçon permettra d’enrichir la famille, puisque aujourd’hui encore, la jeune fille se doit d’apporter une dote dans sa belle famille.

Mais c’est surtout d’un point de vue confucéen que cette préférence trouve ses origines. En effet, dans la pensée confucéenne, seuls les garçons peuvent transmettre le nom de la famille (« ho ») et perpétrer le culte des ancêtres au sein de la famille. Avoir un héritier s’inscrit donc pleinement dans la pensée confucéenne, mais inversement, ne pas en avoir serait considéré comme « le plus répréhensible » en ce qui concerne l’impiété filiale. Aussi, on apprend que
« l’expression vô hậu, « ne pas avoir de descendant », ou tuyêt tự, « sans héritier », font partie des injures les plus blessantes qu’on puisse proférer ».

Donc si la descendance prend donc une signification particulière, « avoir un héritier devient pour un homme un souci majeur, voire une obsession. En cas de stérilité, et après avoir essayé tous les moyens « ordinaires » - notamment prendre une ou des concubines, implorer différentes divinités pour qu’elles lui accordent un fils – il peut en désespoir de cause consentir à laisser féconder sa femme par un homme d’une autre région. Cette coutume, appelée thả cỏ, « mettre au pâturage », est accepté par la famille alors que l’adultère constitue en d’autres circonstances un crime passible de la peine capitale ».

Dans la société vietnamienne donc, la famille est « dominée par le père et les membres masculins. (…). La femme est reléguée au second rang ».

On peut alors ici s’intéresser à l’Œdipe au Vietnam. Chartier (2006) s’interroge sur l’universalité de ce concept, et conçoit pour l’exemple de la Chine une « impossibilité psychique d’envisager la mise à mort du père ». Face à cela, il propose alors de rechercher tout de-même une « une version différente où l’on retrouve néanmoins les constantes pulsionnelles d’amour et de haine ».


3/ Le choix du nom

Le choix du nom pour l’enfant suit également de nombreuses traditions et croyances populaires. Habituellement au Vietnam, le nom est composé de trois ou quatre parties. La première est le patronyme (« họ »), en relation avec l’ordre de filiation et l’appartenance à la famille clanique et qui se transmet par la lignée paternelle. Suivent ensuite un prénom intermédiaire (« tên lót ») désignant généralement la position de l’enfant dans la fratrie ou le sexe de l’enfant, et enfin un dernier prénom (« tên ») qui sert à un usage familial et privé.

A sa naissance, l’enfant ne reçoit pas de nom, mais juste une appellation temporaire et assez banale, car en effet, « les beaux noms pourraient tenter les diables et les fantômes »: le nom véritable ne sera donné que plus tard. Aussi, nous apprenons que « dans la tradition, la double dénomination servait aussi à tromper un mauvais génie qui pourrait, en passant par-là, emporter l’enfant encore fragile en entendant son beau nom ».

Le choix de la dernière partie du nom renvoie généralement à une signification particulière. Cela peut se référer à l’animal horoscopique de l’année de naissance, à la même racine que le caractère chinois du père, un nom de plante, de fleur ou d’animal, un nom de métal, de vertu, de science, de saison ou encore le lieu de naissance…

La beauté du nom, sa musicalité et sa symbolique sont très recherchées et « d’ordinaire, c’est le grand-père ou le père qui a l’honneur de donner le nom de l’enfant ». Aussi, il est
« interdit de donner à son enfant le nom d’un ancêtre » ou encore de reprendre un nom déjà porté par une autorité supérieure: ancêtres, rois, illustres lettrés ... ce qui serait un manque de respect pour la hiérarchie sociale et familiale.
Le nom donné par la famille va donc être fortement chargé d’attentes et d’espoirs : « Il détermine ainsi les contours dans lesquels l'enfant va grandir et être éduqué. Il constitue un point de mire et un idéal obsédant que l'intéressé et la collectivité familiale se partagent et qu'ensemble ils se sont imposés, comme le but et le sens de la vie à mener ou les gratifications à recevoir d'une vie bien remplie. Pratiquement, le sens du nom devrait déterminer et guider le sens de l'existence ».

Aussi, Liêm et al. (2003), voient alors dans le nom donné un élément qui « [installera] chez l’enfant l’apprentissage du repérage des espaces privés et publics, le ressenti vécu réel de la famille de sa place et l’aspiration individuelle comme un projet de vie dans le social ».

Toutefois, le choix du nom se devra d’être harmonieux et sans excès d'ambition ni de vanité, car il risquerait alors de nuire à l'individu, d’attirer les jalousies et de ne pas lui porter chance. Au pire, il pourrait attirer les mauvais esprits et des actions maléfiques comme des maladies fatales qui ne seraient que la manifestation visible de l’enlèvement invisible de l’enfant par un génie.

Aussi, Liêm et Chau (1986) ont étudié l’évolution du nom que les vietnamiens pouvaient porter au cours de leur vie, en fonction de leur âge : le nom d'état civil, le nom commun, le nom emblématique, le nom alias, le nom posthume… qui sont autant de « repères des moments de la vie d'un individu: la naissance, le jeune âge, le passage à une vie sociale d'adulte, la vieillesse et la mort ».

L'enfant devenu adulte pourra ainsi choisir un autre nom que celui qui lui a été donné par ses parents à la naissance, mais il devra « expliquer les raisons de ce choix, par rapport aux choix parentaux, devant la famille. Sans cette précaution, l'individu désigné risquerait, plus tard, de ne pas se reconnaître dans les prières et les invocations qui lui seront adressées, après sa mort, par ses descendants ».

Aussi, d’autres situations peuvent amener un changement de nom comme des cas de changement réel de famille comme l'adoption ou la donation5. Un changement de nom peut également être effectué pour protéger un enfant de mauvaises influences d’un génie malfaisant et de le placer sous de nouvelles protections. Dans tous les cas, des cérémonies devront être effectuées pour faire participer les ancêtres à cet évènement.

Enfin, toujours dans une dimension fortement orientée vers la communauté, l’individu sera habituellement appelé avec son dernier prénom, précédé par un titre le situant dans communauté : titre familial (grand-père, grand-mère, oncle, tante…), titres socio- professionnels (lettré, professeur, maçon, journaliste..), titres honorifiques (notable, martyre…)…

Sur ce sujet, voir le Mémoire de psychiatrie transculturelle présenté par Hoffet, M.E. (2005). Les traditions de changement du nom personnel au Vietnam pour venir en aide aux enfants en difficulté dans leur développement. Réflexions sur le rôle des coutumes familiales pour le bon développement d’un enfant. Université Paris 13.
Département de psychopathologie clinique de l'enfant et de la famille sous la direction du Docteur Marie-Rose.


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